Ce blog est dédié au patrimoine et à la mémoire. Mémoire des pierres, mémoire des hommes. Nous sommes tous potentiellement des "passeurs de mémoire".
30 Octobre 2018
Les remparts de Verneuil
La Porte D'Armentières
Verneuil fut fondée en 1120 par Henri 1er Beauclerc[1]. Elle était entourée de remparts et considérée comme la plus importante ville fortifiée de Normandie. De ces remparts ne subsistent aujourd’hui qu’un tronçon de 380 mètres qui ne doit sa survie qu’à la création de l’abbaye Saint-Nicolas au 17ème siècle, car il fut utilisé comme clôture pour le couvent. On peut aussi voir quelques pans de remparts vers la Tour Grise.
C’est dans la partie liée à Saint Nicolas que se trouve la Porte d’Armentières. L’ensemble a beaucoup été remanié et pour le moment les archéologues en charge de l’étude des lieux ne peuvent affirmer une datation précise, mais juste une fourchette couvrant les 12ème et 13ème siècles. De même on ne peut dater la fermeture de la Porte, si ce n’est que cette fermeture a pu intervenir alors que son utilisation n’était plus nécessaire et que sa condamnation pouvait être une mesure de sécurité. Il est probable également que le fossé ait été recreusé et élargi à cette époque pour en renforcer son efficacité. La terre retirée étant remontée au pied du rempart, ce qui expliquerait la différence de niveau entre sol intérieur et extérieur.
En 2017 l’association pour la Sauvegarde du Verneuil Médiéval organise un chantier de nettoyage. Ce chantier se déroule sous le double contrôle de l’UDAP de l’Eure et de l’Intercommunalité Normandie Sud Eure propriétaire de l’abbaye. Le lierre a envahi les murs créant d’importants désordres.
Ce chantier démarre à l’extrémité nord, au niveau de ce que l’on peut appeler la porte de la poterne, une porte ouverte assez récemment. Pendant six mois les bénévoles de l’association vont se relayer. Les portions de murs les mieux conservées sont nettoyées du lierre, soit en totalité, soit partiellement. Il s’agit de ne pas mettre à nu le faîte des murs, de ne pas faire d’arrachage sauvage.
Le mur donnant sur le cimetière
Cette opération a permis de découvrir le mode de construction : le mur est monté en silex liés par un mortier de chaux. Les silex du parement apparaissent bien alignés par rangs. Tous les quatre rangs on peut voir la trace des bois utilisés pour leur soutien durant le temps de séchage et de durcissement qui est relativement long. Quand l’état du mortier le permettait les ouvriers remontaient quatre rangs, etc.
Les rangs de silex bien ordonnés du parement
Au niveau du cimetière on devine une forme d’ouverture. Ce pourrait être l’indication de la présence d’une tour extérieure carrée qui apparait à cet endroit sur le cadastre Napoléon.
Extrait du cadastre Napoléon
Possible ancien accès à la tour extérieure
Du côté des fossés la portion de mur sur laquelle Verneuil Médiéval s’est employée a été remaniée au 19ème siècle en partie basse.
Plus loin une entreprise a effectué le déliérrage de la Porte d’Armentières. On peut maintenant l’admirer avec son parement de grisons depuis les promenades de la Gueule d’Enfer. Mais on découvre aussi son délabrement, celui des murs qui l’entourent, et l’importance du travail qui devra être effectué.
Portion de mur jouxtant la porte montrant les dégradations du temps
Petite anecdote à propos de cette porte : il est dit que le roi Saint Louis, il faudrait d'ailleurs dire Louis IX, y serait passé lors de sa visite à Verneuil en 1257...
[1] Astrid Lemoine Descourtieux, La Frontière Normande de l’Avre, pp 301-351, PURH, 2011